Vivre avec les chevaux : le quotidien d’une femme passionnée
À la tête du Haras des Deux Vents, ouvert en octobre 2024 près de Perpignan, Manon consacre ses journées à l’élevage, la pension et la valorisation des chevaux. Rencontre avec une jeune femme pour qui le mot « passion » n’est pas un simple slogan.
Une vocation forgée par l’expérience et la détermination
« Je me sens plus forte auprès des chevaux qu’ailleurs », affirme Manon, sourire franc, les bottes encore couvertes de terre de paddock. Sa passion ne date pas d’hier. Elle commence à monter à cheval à dix ans. Elle considère que cet âge est « tardif », mais l’explique par le fait que sa famille vivait en région parisienne, où les haras et les clubs sont plus rares et les coûts plus élevés. Mais dès ses premières séances, le déclic est là. Après le bac, elle choisit la voie directe : une formation d’animatrice poney, suivie d’un BPJEPS, puis ses premiers postes dans des centres équestres. Arrivée à Perpignan en 2010, elle se forge une expérience solide sur le terrain. « J’ai voulu tester différents environnements avant de monter ma structure », explique-t-elle. En octobre 2024, à seulement 25 ans, elle franchit le pas et ouvre le Haras des Deux Vents : une écurie propriétaire où elle gère à la fois l’élevage, la pension et la vente de chevaux.
Un quotidien exigeant, entre travail physique et dressage minutieux
Pour Manon, les journées n’ont pas d’horaires fixes. Tout commence par la distribution du foin, le contrôle des paddocks, le nettoyage pour limiter la prolifération de mouches en
été. « Un cheval mange environ quinze heures par jour. Il faut surveiller son alimentation, ses habitudes, ses réactions. Rien n’est laissé au hasard. » L’hiver, les matinées sont consacrées aux tâches physiques : entretien des clôtures, réparations diverses, suivi sanitaire. L’après-midi, place au travail des chevaux. Monter, dresser, apprendre aux jeunes équidés à comprendre l’humain : chaque séance paraît semblable mais demande une approche unique. « Ce qui me plaît le plus, c’est d’analyser un cheval, de comprendre ses comportements. J’aime particulièrement les chevaux dits “à problème” : il y a un vrai travail psychologique à mener avec eux. » Elle se souvient notamment d’un Selle Français de quinze ans, ignoré par son ancien propriétaire, qu’elle a remis en confiance avant de le revendre. « C’était un défi : il n’avait pas eu un bon débourrage et avait perdu l’envie de travailler. Mais le voir évoluer, c’est une satisfaction immense. »
Des liens uniques avec ses chevaux et des réussites marquantes
Parmi les nombreux chevaux qui croisent sa route, deux ont particulièrement marqué Manon : Circée, sa première jument, et Vénus, qu’elle sort encore aujourd’hui en concours. « Avec Vénus, j’ai tout appris. Ce que j’étudiais en cours la semaine, je le mettais en pratique sur elle le week-end. Elle m’a permis de progresser et de me faire la main. »Chaque cheval a son caractère, et Manon l’a bien compris : « Vénus comprend très vite, Circée avance plus lentement. Il faut s’adapter à chacun, on ne peut pas imposer une méthode unique. » Sa plus grande émotion reste la naissance de Narcos, le premier poulain qu’elle a fait naître seule. « J’ai veillé toute la nuit dans ma voiture devant le paddock. Quand il est sorti, imposant et vif, j’ai tout de suite su que les prénoms que nous envisagions de lui donner ne lui iraient pas, c’est pour cela que j’ai choisis un prénom synonyme de respect.C’était un moment de stress et de joie mêlés, une vraie rencontre. » Depuis, la mère de Narcos, Véry, a eu Opale, et elle devrait donner naissance à un dernier poulain l’année prochaine, Manon ne souhaitant plus la faire pouliner ensuite pour la préserver.
Des projets ambitieux pour l’avenir du Haras des Deux Vents
Si Manon a déjà beaucoup accompli, elle ne compte pas s’arrêter là. Elle souhaite augmenter le nombre de pensions, développer la valorisation et la revente des chevaux avec un roulement de trois à quatre montures de budgets différents, afin de répondre aux attentes d’un large public. « Ce que j’aime par-dessus tout, c’est acheter un cheval, le travailler, puis le confier à quelqu’un de responsable. J’ai besoin de savoir qu’il sera bien entre de bonnes mains. » Elle mise aussi sur la transmission : actuellement accompagnée d’une apprentie, elle lui enseigne non seulement la technique mais aussi l’état d’esprit nécessaire. « C’est un métier passion. Il faut accepter de ne pas avoir de week-ends ni de jours fériés. Et si on enseigne, il faut aussi aimer les enfants et avoir de la patience. » Dans les Pyrénées-Orientales, où les élevages se font plus rares que dans des régions comme la Normandie, Manon veut maintenir une mise bas régulière d’un poulain par an, afin de former et valoriser ses chevaux dès la naissance. « Mon objectif, c’est de tout miser sur la qualité, pas la quantité. »
Une vie au service des chevaux
Trois mots résument le quotidien de Manon : écoute, compréhension et passion. Son travail n’est pas seulement un métier, c’est une manière de vivre qui façonne ses journées et ses choix. Depuis ses débuts, elle a toujours cherché à comprendre chaque cheval, à analyser ses réactions et à construire une relation de confiance avant tout. C’est ce qui l’a poussée à privilégier l’élevage et la valorisation des poulains qu’elle fait naître elle-même, afin de les suivre dès leurs premiers pas et de mieux les connaître. Au Haras des Deux Vents, rien n’est laissé au hasard : l’alimentation, les soins quotidiens, le suivi de la santé et le travail sur le terrain font partie d’une routine exigeante mais essentielle. Manon sait que ce métier ne compte pas les heures, qu’il offre très peu de week-ends et ne connaît pas les jours fériés. C’est justement ce qui, pour elle, le rend unique : vivre chaque jour en contact direct avec les chevaux, voir leur évolution, sentir leurs progrès.Son parcours prouve qu’une passion profonde peut devenir un projet solide, et qu’avec de la patience, du travail et une écoute constante, il est possible de bâtir une activité équestre durable et fidèle à ses valeurs.
Rédigé par SAM BRAVO
Élever et valoriser ses chevaux : un pari sur l’avenir
Élever et valoriser ses chevaux : un pari sur l’avenir
Au Haras des Deux Vents, Manon ne se contente pas d’élever des chevaux : elle les façonne, les comprend et les prépare pour l’avenir. Dans une région où les élevages sont moins nombreux qu’ailleurs, elle fait le pari de produire des chevaux de qualité, en alliant tradition, savoir-faire et innovation.
Naître sous le signe de l’attention
Pour Manon, chaque poulain représente un potentiel unique. Depuis l’ouverture de son haras en octobre 2024, elle a fait le choix réfléchi de produire un poulain par an. Cette décision n’est pas anodine : elle lui permet de suivre chaque animal dès ses premiers pas et de le connaître intimement. L’attention portée aux naissances n’est pas seulement un geste technique, mais un véritable travail d’observation et d’anticipation des capacités et du tempérament de chaque cheval, qui servira plus tard dans sa valorisation. Le suivi des poulains implique un contrôle sanitaire constant, une alimentation adaptée, des soins réguliers et une familiarisation progressive à l’homme et à l’environnement. Manon accorde une importance particulière au lien entre le poulain et sa mère, assurant que la jument puisse transmettre sécurité et confiance à son petit. Cette approche, fondée sur l’attention et la patience, est d’autant plus essentielle dans une région où les élevages sont moins nombreux et les opportunités d’apprentissage moins fréquentes qu’en Normandie ou dans d’autres grands bassins équestres.
Éducation et dressage progressifs : un apprentissage sur mesure
L’élevage ne s’arrête pas à la naissance. Chez Manon, chaque poulain suit un programme d’éducation sur mesure, visant à développer ses capacités et sa compréhension de l’homme. La manipulation quotidienne, les premières sorties, puis le travail plus technique permettent au jeune cheval de s’adapter à différents environnements et situations. « Chaque cheval est unique. On ne peut pas appliquer une méthode standard », explique Manon. L’objectif est d’obtenir des chevaux équilibrés, polyvalents et capables de répondre aux attentes variées des futurs propriétaires, qu’ils soient amateurs, cavaliers confirmés ou compétiteurs. Cette approche progressive permet de créer des chevaux sûrs et confiants, capables d’évoluer dans différents contextes, qu’il s’agisse de la compétition ou d’une simple pratique de loisir. Le travail avec les chevaux dits « à problème » occupe une place particulière dans la démarche de Manon. Ces animaux demandent plus de temps et d’observation, mais permettent de développer une véritable relation basée sur l’écoute et la compréhension mutuelle. La remise en confiance d’un Selle Français de 15 ans, mal débourré et abandonné par son précédent propriétaire, illustre parfaitement cette philosophie : voir le cheval évoluer et retrouver le plaisir du travail constitue pour elle une grande satisfaction professionnelle.
Valorisation et marché : un équilibre délicat
La valorisation est l’aboutissement naturel de l’élevage. Manon prépare chacun de ses chevaux pour la vente, la compétition ou pour des cavaliers débutants. La sélection des futurs propriétaires fait partie intégrante du processus : elle veille à ce que ses chevaux soient confiés à des personnes responsables, capables de respecter le travail accompli et d’assurer le bien-être des animaux. Cette valorisation repose sur plusieurs critères : l’éducation du cheval, ses aptitudes naturelles, sa santé et sa capacité à s’adapter aux différents profils de cavaliers. Elle permet à Manon de maintenir un roulement de trois à quatre chevaux par an avec des budgets variés, offrant ainsi une diversité d’options sur le marché et touchant un publicplus large. C’est aussi une façon de garantir que chaque cheval trouve un propriétaire qui correspond à son caractère et à ses capacités. L’investissement dans la valorisation a également une dimension stratégique. Dans un territoire où les élevages diminuent, produire des chevaux bien préparés et polyvalents est un atout pour maintenir une activité viable. La démarche de Manon illustre comment la qualité et la préparation peuvent créer de la valeur, tant pour le cheval que pour l’éleveur.
Un engagement pour l’avenir de l’élevage
L’ambition de Manon dépasse le cadre du Haras des Deux Vents. Elle souhaite contribuer au maintien et au développement de l’élevage dans sa région. En privilégiant la formation et la valorisation des chevaux, elle espère créer un modèle durable qui inspire d’autres jeunes éleveurs et favorise la qualité des chevaux produits localement. Le pari est double : assurer la pérennité de son haras et démontrer qu’un élevage dans une région moins dense peut être rentable, éthique et qualitatif. Pour Manon, élever et valoriser ses chevaux est un engagement à long terme : un pari sur l’avenir de chaque animal, mais aussi sur la vitalité d’un territoire équestre qui conserve un réel potentiel malgré la baisse du nombre d’élevages.
Une vision à long terme : qualité, éthique et pérennité
L’élevage et la valorisation ne sont pas seulement des métiers pour Manon, c’est une philosophie. Chaque décision, de la sélection des poulains à la vente finale, est guidée par la qualité, le respect de l’animal et la pérennité de l’élevage. Dans un monde où les chevaux sont souvent perçus comme des biens de consommation, son approche rappelle que chaque animal est un projet de vie, nécessitant attention, patience et passion. À travers le Haras des Deux Vents, Manon montre qu’il est possible de conjuguer passion, profession et responsabilité, en plaçant l’animal au centre de toutes les décisions. Élever et valoriser ses chevaux devient alors un pari sur l’avenir, non seulement pour le haras et les propriétaires, mais pour la filière équestre toute entière.
Rédigé par SAM BRAVO